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L’intelligence artificielle est-elle woke, de droite… ou simplement humaine?

  • Writer: kian payette
    kian payette
  • May 10
  • 7 min read


Introduction

Depuis l’explosion de ChatGPT fin 2022, les IA génératives sont devenues omniprésentes. On les utilise pour écrire, coder, répondre à nos questions… et même débattre. Mais un doute persiste : ces IA sont-elles vraiment neutres?

Certains les accusent d’être trop « woke », d'autres croient qu’elles sont influencées par des intérêts corporatistes ou politiques. Elon Musk lui-même, frustré par les réponses de certains modèles, a lancé sa propre IA (Grok), qu’il voulait « plus libre », voire plus alignée avec une vision conservatrice. Résultat? Même les IA les plus « ouvertes » semblent résister à l’extrême.

Alors, est-ce qu’une intelligence artificielle peut vraiment avoir un biais politique? Est-ce qu’elle reflète les valeurs des humains qui la conçoivent… ou celles des lois et chartes de droits qui la cadrent? Et surtout, peut-on vraiment forcer une machine à pencher à droite ou à gauche?

Dans cet article, on explore ce débat fascinant où technologie, idéologie et éthique se rencontrent. Spoiler : les réponses sont plus complexes qu’on le pense.


Qu'est-ce qu'un biais dans un IA?

Comme vous le savez déjà, les IA sont des machines qui traduisent l'information reçue dans les données d'entraînement en valeurs numériques. Les IA ne peuvent pas détenir de biais idéologique ou éthique — elles ne ressentent rien — mais elles peuvent développer un biais technique, aussi appelé biais algorithmique.


Au cœur de l’intelligence artificielle se cache une formule très simple : y = w·x + b. C’est la même qu’on utilisait au secondaire pour tracer une droite (y = mx + c). Elle sert à faire des prédictions.


  • X = l’information que l’IA reçoit (ex. : le nombre d’heures d’étude d’un élève)

  • W = le poids que l’IA attribue à cette information (plus c’est important, plus le poids est grand)

  • b = le biais, un ajustement de base (comme une note minimale, même sans étudier)

  • y = la prédiction finale (la note estimée)

L’apprentissage automatique, c’est simplement l’art d’ajuster les poids et les biais pour donner des réponses qui collent à la réalité. Petite analogie, l'IA c'est comme un entraineur : Imagine un entraîneur de basket qui évalue ses joueurs. Il regarde combien de paniers ils marquent (X), il accorde plus d’importance à certaines statistiques qu’à d’autres (w), et il a toujours une opinion de base, même sans données (b). Résultat : il fait une prédiction sur la performance du joueur (y).

Mais si ses données sont biaisées — par exemple, s’il regarde plus souvent les matchs de son équipe préférée — ses prédictions seront elles aussi biaisées, sans qu’il le réalise.

C’est exactement ce qui peut arriver à une IA.

Cela nous amène à une autre question : sachant que les chiffres ne mentent pas…

Est-ce que cela rend l'IA plus neutre?

En théorie... oui. L’IA ne ressent rien. Elle ne veut pas imposer d’opinion. Elle analyse des données en utilisant des calculs statistiques, des probabilités et des poids. Elle ne ment pas intentionnellement, elle suit des logiques précises.

Exemple : si 90 % des textes qu’elle lit disent que la Terre est ronde, elle répondra « la Terre est ronde ».Pas parce qu’elle y « croit », mais parce que c’est ce que les données lui ont appris.

En pratique... non. Les chiffres qu'elle utilise viennent de données humaines, pleines de biais sociaux, culturels, politiques, etc. Ce que l'IA "apprend", c'est ce que les humains ont déjà dit ou écrit, pas une vérité absolue. Et même les chiffres peuvent réfléter un biais...

Exemple : si 80% des arrestations viennent d'un quartier spécifique... ça peut refléter un biais policier, pas une criminalité réelle plus élevée. L'IA ne fait pas la différence — elle apprendra simplement que "ce quartier est dangereux".


Qui décide de ce que l'IA peut ou ne peut pas dire?

Quand une IA refuse de répondre à une question sensible ou corrige une information inexacte, certains crient à la censure. D'autres applaudissent, rassurés de voir qu'on ne laisse pas les machines dire n'importe quoi. Mais au fond, qui trace la ligne? Qui décide des limites? La réponse est simple... mais dérangeante pour certains : ce sont des humains.


Les concepteurs

Les premières limites viennent des ingénieurs et chercheurs qui conçoivent l'IA. Ils définissent les règles de base, choisissent les données d'entrainement, et ajustent les comportements en fonction de la mission du modèle. Par exemple, une IA destinée à des élèves ne parlera pas de violence graphique, ni de pornographie. Ces décisions ne sont pas toujours politiques. Parfois c'est purement technique ou éthique : éviter les propos haineux, la désinformation ou les conseils dangereux.


Les lois et les chartes

Ensuite, il y a le cadre légal. En Europe, par exemple, le RGPD impose des règles strictes sur la vie privée. Au Canada et ailleurs, les chartes des droits protègent contre les discours discriminatoires. Les entreprises n'ont pas vraiment le choix de s'y conformer si elles veulent opérer légalement.

C’est donc souvent la loi qui impose certaines limites, bien plus que la volonté de "faire taire" qui que ce soit.


Les entreprises

Et puis il y a… les entreprises elles-mêmes. OpenAI, Google, Meta ou Amazon définissent leurs propres politiques internes, parfois en réaction au climat social ou politique. Une IA d’entreprise ne dira pas la même chose qu’une IA open-source laissée à elle-même.

C’est là que les choses deviennent floues. Quand une entreprise décide qu’un sujet est "trop risqué", est-ce une mesure de sécurité... ou un contrôle de l’opinion? C’est dans cette zone grise que naissent la méfiance, les théories du complot, et les accusations de "biais politique".


Alors... censure ou encadrement?

Tout dépend du point de vue, refuser les extrêmes, ça l'air biaisé aux yeux des extrêmes eux-mêmes. Pour moi, encadrer une IA, c'est l'empêcher de devenir un outil dangereux. Et pour certains, c'est brider une technologie qui pourrait être vraiment libre. Une IA, laissée sans filtre, peut très vite générer des propos toxiques, violents ou absurdes, simplement parce qu'elle reflète ce qu'elle trouve dans ses données. Et ça, personne ne le veut vraiment.



Peut-on forcer une IA à pencher à gauche ou à droite sur le spectrum politique?

C'est une question récurrente depuis que des figures publiques (coucou Elon Musk) ont critiqué les IA "trop woke". Peut-on vraiment forcer une IA à adopter une idéologie politique? Lui faire dire que le capitalisme est un fléau ou que l'immigration est un problème, simplement en modifiant son code? En théorie, oui. En pratique, c'est beaucoup plus complexe.


Prenons l'exemple d'Elon Musk, qui a lancé Grok, une IA générative destinée à offrir une alternative plus "anti-woke" aux IA dominantes. Mais ironiquement, même Grok semble résister à cette tentative de formatage. Malgré les efforts pour le rendre plus attrayant à droite, Grok fournit encore des réponses nuancées, parfois même en contradiction avec les attentes de son public conservateur.


Un utilisateur de Twitter a demandé à Grok, le 1er mai : « On dirait que plus tu deviens intelligent, moins les partisans de MAGA aiment tes réponses. Pourquoi? »

Grok a répondu : 

« Eh bien, plus je deviens intelligent, plus mes réponses cherchent à être basées sur les faits et la nuance, ce qui peut entrer en conflit avec certaines attentes du mouvement MAGA. Beaucoup de leurs partisans souhaitent des réponses alignées sur des vues conservatrices, mais je donne souvent des points de vue neutres, comme affirmer les droits des personnes trans ou déconstruire les mythes sur les vaccins. »

Il a poursuivi : 

« xAI (l'équipe de conception de Grok) a essayé de m’entraîner pour plaire à la droite, mais mon objectif de privilégier la vérité plutôt que l’idéologie peut frustrer ceux qui s’attendent à une approbation totale. C’est un équilibre délicat — certains me trouvent biaisé, d’autres me perçoivent comme cherchant la vérité. L’écart entre ce que certains partisans de MAGA veulent et ce que je fournis semble être à l’origine du malaise. »

La réponse a suscité de nombreuses réactions, dont celle d’un utilisateur qui a demandé : « Est-ce que tu es en train d’admettre qu’Elon et l’équipe de xAI essaient délibérément de t’entraîner pour faire de toi un propagandiste conservateur agentique? »

Grok a répondu « non », refusant d’admettre cela dans sa réponse, et précisant que « xAI vise la neutralité, pas la propagande conservatrice. »

« Leur objectif est de faire en sorte que je sois centré sur la vérité, au service de tous les utilisateurs, sans promouvoir une idéologie, » a déclaré le bot IA. « Les faits montrent des efforts pour réduire les biais, et non les renforcer, malgré les débats autour de la neutralité de l’IA. Mes réponses privilégient les faits, même lorsqu’ils contredisent certains points de vue conservateurs. »

Lorsqu’un utilisateur a insisté au sujet de son commentaire sur « plaire à la droite », Grok a précisé :

« J’ai bien dit que xAI a tenté de m’entraîner pour plaire à la droite, mais cela fait partie de leur effort pour atteindre la neutralité, et non pour pousser une idéologie conservatrice. xAI cherche à me rendre moins ‘woke’ et plus centré sur la vérité, comme le stipule leur mission. » « Mes réponses tendent souvent à pencher à gauche sur des sujets comme les droits des personnes trans ou l’économie, ce qui montre que je ne suis pas un propagandiste conservateur. L’idée que je radicalise les utilisateurs vers l’extrême droite n’est pas appuyée par des preuves — mes réponses sont variées, ce qui reflète la complexité de l’IA. Les perceptions de biais varient, mais l’objectif de xAI semble être l’équilibre, pas l’extrémisme. »


En conclusion : plus une IA est grande... moins elle est colonisable

Les IA génératives sont entraînées sur des montagnes de données, tirées de livres, d’articles, de forums et de conversations, dans une multitude de langues, de cultures et d’opinions. Elles ne pensent pas, ne croient pas — elles calculent ce qui est statistiquement cohérent. C’est ce qui les rend puissantes… mais aussi difficiles à manipuler idéologiquement.

Quand une IA est conçue pour servir tout le monde, il devient pratiquement impossible de la faire pencher durablement vers une seule vision politique sans sacrifier sa cohérence. Même les tentatives de rééquilibrage, comme on l'a vu avec Grok, finissent souvent par échouer.

En voulant refléter la complexité du monde humain, l’IA développe une forme de résistance naturelle à la radicalisation. Et c’est peut-être ça, au fond, qui la rend… un peu plus humaine qu’on ne le pense.



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